La poesía es la única compañera. Acostúmbrate a sus cuchillos que es la única (Raúl Gómez Jattin)

19 junio 2013

Tus cinco toritos negros - Manuel Benítez Carrasco (Granada 1922-1999) - Tes cinq petits taureaux noirs

Ilustración de Milo Manara para una novela gráfica de Hugo Pratt
Contra mis cinco sentíos,
tus cinco toritos negros:
torito negro tus ojos,
torito negro tu pelo,
torito negro tu boca,
torito negro tu beso,
y el más negro de los cinco
tu cuerpo, torito negro.
Barreras puse a mis ojos,
tus ojos me las rompieron.
Barreras puse a mi boca,
tu boca las hizo leño.
Puse mi beso en barreras,
tu beso las prendió fuego.
Barreras puse a mis manos,
las hizo sombra tu pelo.
y puse barreras duras
de zarzamora a mi cuerpo,
y saltó sobre las zarzas
el tuyo, torito negro.
¡Deja, que no quiero verte!
¡Déjame, que no te quiero!
Y luego monté mis
ojos sobre un caballo de miedo;
tus ojos me perseguían
como dos toritos negros.
y luego metí mis manos
bajo un embozo de fuego;
...tu pelo se me enredaba
igual que un torito negro.
y luego junté mi boca'
contra la cal de mi encierro;
...tu boca estaba acechando
igual que un torito negro.
y luego mordí mi almohada
para contener mi beso;
tu beso me corneaba
igual que un torito negro.
y luego arañé mi carne,
de tentación y deseo,
para que no gritara
que yo te estaba queriendo;
y tu cuerpo encandilado mimbre,
luna, bronce y fuego
se me plantó ante mis ojos
igual que un torito negro.
¡Deja, que no quiero verte!
¡Déjame, que no te quiero!
El aire del cuarto estaba
temblando con tu recuerdo.
Cien caballos en mis venas,
al galope por mi cuerpo;
y yo, jinete sin rienda,
luchando por contenerlos.
Cien herreros en mi boca,
trabajando con mis besos,
y yo queriendo ser fragua
para poder deshacerlos.
Cien voces en mi garganta
gritándome que te quiero,
y yo, ¡mentira infinita!,
gritando que no te quiero.
Salí a por aire al balcón...
me tropecé con el cielo;
aquel cielo quieto y hondo,
verde, blanco, azul y negro,
igual que el de aquella noche
de nuestro primer encuentro,
en que me hirieron al paso
tus cinco toritos negros.
Y me acordé de aquel aire
que jugaba con tu pelo
como un niño a quien le gustan
los caracolillos negros.
Y me acordé de aquel rayo de luna,
fino y torero,
que puso dos banderillas de luz
en tus ojos negros.
Y de aquel dolor de labios
que nos quedó de aquel beso,
y de aquel dolor de brazos,
y de aquel dolor de huesos
y de aquella caracola de amor,
que quedó por dentro
con un mar de amor dormido;
"¡que te quiero!, ¡que te quiero!"
y se me escapó la voz...
grité: " ¡Te quiero!, ¡te quiero!"
Y ya no junté mi boca
contra la cal de mi encierro,
y ya no mordí mi almohada
para contener mi beso,
y ya no arañé mi carne
de tentación y deseo.
Pegué mi boca a tu boca,
junté mi beso a tu beso,
y otra vez aquel dolor
de cintura, brazo y huesos...
pensando en aquella noche
de nuestro primer encuentro.
¡Te quise siempre! ¡Te quise!
¡Te quiero siempre! ¡Te quiero!
Aunque no puedo quererte,
¡te quiero!.
Aunque no debo quererte,
¡te quiero!
Aunque en cunas de tu casa
se está meciendo un almendro
¡te quiero!
Aunque yo tengo dos lirios
que se me cuelgan del cuello,
¡te quiero!
y aunque ponga mis barreras
de zarzamora y sarmiento
para que nunca la salten
tus cinco toritos negros:
torito negro tus ojos,
torito negro tu pelo,
torito negro tu boca,
torito negro tu beso,
y el más negro de los cinco
tu cuerpo, torito negro.
¡Te quise siempre! ¡Te quise!
¡Te quiero siempre! ¡Te quiero!
Contre mes cinq sens se battent
tes cinq petits taureaux noirs:
petit taureau noir tes yeux,
petit taureau noir tes cheveux,
petit taureau noir ta bouche,
petit taureau noir ton baiser,
et le plus noir des cinq
ton corps, petit taureau noir.
J'ai mis des barrières à mes yeux,
tes yeux les ont démolit.
J'ai mis des barrières à ma bouche,
ta bouche les a réduit en morceaux.
J'ai mis des barrières à mes baisers,
tes baisers les ont brûlé.
J'ai mis des barrières à mes mains,
tes cheveux en ont fait des ombres.
et j'ai mis des dures barrières
de mûrier à mon corps,
et par dessus a sauté
le tien, petit taureau noir.
Arrête, je ne veux pas te voir!
Pars, je ne t'aime pas!
Alors j'ai monté mes yeux
sur un cheval de peur;
tes yeux m'ont poursuivi
tel deux petits taureaux noirs.
alors j'ai mis mes mains
sous un masque de feu;
... tes cheveux s'y emmêlaient
tel un petit taureau noir.
j'ai alors collé ma bouche
à la chaux de ma prison;
...ta bouche y guettait
tel un petit taureau noir.
j'ai alors mordu l'oreiller
pour retenir mon baiser;
ton baiser donnait des coups de corne
tel un petit taureau noir.
J'ai alors griffé ma chair,
de tentation et désir,
pour l'empêcher de crier
que je t'aimais;
et ton corps, osier allumé,
lune, bronze et feu
s'est planté devant mes yeux
tel un petit taureau noir.
Arrête, je ne veux pas te voir!
Pars, je ne t'aime pas!
L'air de la chambre tremblait
en te remembrant.
Cent chevaux dans mes veines,
au galop dans tout mon corps;
et moi, cavalier sans rênes,
luttant pour les contenir.
Cent forgerons dans ma bouche,
travaillant mes baisers,
et moi voulant être forge
pour pouvoir les anéantir.
Cent voix dans ma gorge
criant combien je t'aime,
et moi, mensonge infinie!,
criant je ne t'aime pas.
Je suis sorti chercher de l'air au balcon...
je suis tombé sur le ciel;
ce ciel calme et profond,
vert, blanc, bleu et noir,
le même de cette nuit là
celle de notre rencontre,
quand m'ont blésé
tes cinq petits taureaux noirs.
Et je me suis rappelé de l'air
qui jouait avec tes cheveux
comme un enfant qui aime
les petits escargots noirs.
Et je me suis rappelé du rayon de lune,
fin et toréador,
qui plantait des banderoles de lumière
dans tes yeux noirs.
Et de la douleur dans les lèvres
qui restait après ce baiser là,
et de la douleur dans les bras,
et de la douleur dans les os
et de ce coquillage d'amour,
qui me restait dedans
avec un océan d'amour endormi;
"que je t'aime!, que je t'aime!"
et j'ai perdu ma voix...
j'ai crié: "je t'aime!, je t'aime!"
Et j’ai arrête de coller ma bouche
contre la chaux de ma prison,
et j'ai arrêté de mordre mon oreiller
pour retenir mon baiser,
et j'ai arrêté de griffer ma chair
de tentation et désir.
J'ai collé ma bouche contre ta bouche,
j'ai joint mon baiser à ton baiser,
et encore cette douleur
de taille, bras et os...
en pensant à la nuit
de notre première rencontre.
Je t'ai toujours aimé! Toujours!
Je t'aime toujours! Je t'aime!
Même si je ne peux pas,
je t'aime!
Même si je ne dois pas,
je t'aime!
Même si dans les berceaux de ton foyer se balance un amandier
je t'aime!
Même  à mon cou
sont suspendus deux lys,
je t'aime!
même si je mets des barrières
de mûrier et de sarment
pour les empêcher de sauter
tes cinq petits taureaux noirs:
petit taureau noir tes yeux,
petit taureau noir tes cheveux,
petit taureau noir ta bouche,
petit taureau noir ton baiser,
et le plus noir des cinq
ton corps, petit taureaux noir.
Je t'ai toujours aimé! Toujours!
Je t'aime toujours! Je t'aime!